Trente ans après l’apparition du concept, est-on capable de savoir les applications les plus utilisées, les plus séduisantes pour le consommateur ? Dans sa dernière enquête Crédoc, Promotelec pose les bonnes questions. Quel but, quels bénéfices ? .
Depuis 1984 la domotique fait tourner les têtes, les esprits mais aussi les langues. On compte par milliers les congrès, conférences, séminaires, ateliers, matinales sur le sujet. Rarement on s’est cependant posé les questions de fond, préférant souvent les élucubrations techniques. À la fin des années 80, ce furent les logements sociaux qui, grâce au programme du Plan Construction baptisé PHI, bénéficièrent de « Tableaux de Bord Domestiques » (TBD) conçus par les sociétés Synforic ( Gle des Eaux) Sild (filiale Schlumberger), ou Bouygues (système Domobus). Il fallait bien mettre en oeuvre le programme interministériel H2E85 (habitat économe en énergie), qui n’est pas sans rappeler les préoccupations de 2014 ! À la fin de 1989, le marché français de la domotique concernait environ 10.000 logements équipés. Mais les expérimentations étaient beaucoup plus nombreuses et mobilisatrices qu’aujourd’hui. Avec Électricité de Strasbourg (et sa maison « Doris »), la maison de Lyon-Panorama d’EDF et des industriels d’Aidelec, le centre de recherche HD2000 à Rennes ou les bâtiments intelligents de Spie-Batignolles. Plus tard «ma m@ isonet» à Etiolles de France Telecom, Cisco et Kaufman&Broad (échec cuisant). Il est important de comprendre le cadre dans lequel a été conduite cette seconde enquête Promotelec-Crédoc, en juillet 2014. En effet les personnes interrogées étaient 1045 propriétaires occupants métropolitains. Avec un échantillon de 926 propriétaires occupants représentatifs au niveau national et 119 habitants de maisons individuelles BBC ayant obtenu le label Promotelec. 20% de ces propriétaires occupants connaissent la domotique. Après 30 ans de communication, je trouve choquant que 78% de ces personnes ignorent encore la domotique. Il est d’ailleurs révélateur d’apprendre qu’à la question « La domotique peut-elle favoriser l’autonomie des personnes âgées ? », 55% répondent oui, mais seulement 8% le font déjà ! Seulement 21% l’utilisent pour « faire des économies d’énergie » et seulement 10% pour « bénéficier d’informations et d’alertes ». C’est sans doute l’autonomie des personnes âgées qui mobilisent 69% des 55-64 ans qui se déclarent prêts à investir, pour accroître leur autonomie et celle de leurs parents. Les économies d’énergie sont l’un des usages les plus directs de la domotique. 31% des propriétaires se déclarent prêts à investir. Les plus motivés sont les jeunes ménages avec de jeunes enfants. 66% des moins de 40 ans sont convaincus de l’intérêt des solutions domotiques pour les économies d’énergie. 36% des propriétaires occupant, souhaiteraient pouvoir disposer d’un écran chez soi délivrant de l’information sur les consommations de chauffage et d’eau chaude, de gestion des ouvrants (17%) et de consommation d’électricité (10%). C’est ce qu’on appelait en 1986 le « tableau de bord domestique » ! En regardant 30 ans en arrière, on s’aperçoit que si la technologie a considérablement évoluée,le marché et les usages n’ont pas suivi la même ascension. Le degré d’intérêt pour la domotique est faible : 35% des moins de 40 ans et près de 40% des 55-64 ans y voient un faible intérêt. 25% des 40-54 ans, un intérêt nul ! Tout reste à démontrer. Des leviers doivent être trouvés.
Bruno de Latour